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Extraits audio sur le site de Christophe Lartilleux

L’affiche toulousaine était alléchante : Latcho Drom : (Lartilleux, guitare), Niculescu (violon), Doudou Cuillerier (guitare, chant), Joël Trolonge (contrebasse), le Quatuor Alma : Zoritsa Stanoyevich au 1er violon, Maud Rouchaléou au 2ème violon, Claudine Christophe à l'alto et Maya Blumenfeld au violoncelle.
Latcho Drom et Djangophonie (le spectacle de Florin Niculescu) invitait 3 pointures de la guitare jazz hexagonale, dans le désordre : Tchavolo Schmitt, Biréli Lagrène et Christian Escoudé. Ce concert, dans le fief de Latcho Drom, à la Halle aux Grains (salle un peu guindée quand même) était sold-out depuis une semaine. Cette fête, c’est avant tout pour les 10 ans de Latcho Drom et comme un événement n’arrive jamais seul, notre cher Tchavolo fêtait ses 49 ans le jour même. C’est Florin qui s’est chargé d’inviter les guitaristes, histoire de pimenter un concert inhabituel ? C’est vrai que Tchavolo Schmitt avec un quatuor classique, ce n’est pas tous les jours…
Le public est en place, les musiciens nerveux (un peu), le rideau s’ouvre et c’est Florin qui commence seul, dans une improvisation vertigineuse, le thème de «The Lady is a tramp», tout le monde s’est décontracté d’un coup et les solistes peuvent décoller et nous donner à tous une leçon de jazz et de décontraction. La rythmique impeccable de Doudou et de Joël, le son parfait. Il faut dire que les gars sont chez eux, le public leur est tout acquis et des salves d’applaudissements commencent à gronder à chaque intervention des solistes. Puis, le Quatuor Alma s’installe et ils attaquent «Amanda», une magnifique compo de Grappelli, Florin retient ses effets et prouve encore son amour pour son héros disparu, le français inventeur du violon jazz et compagnon de Django. Le quatuor enrichit considérablement la musique de Latcho Drom. Trop de violons dans Djangophonie pour certains, gros succès pour d'autres, en tous cas, cette histoire ne laisse pas indifférent. Le public, qui a l'air ravi, leur fait une ovation conséquente (en plus, elles sont jolies, alors...). Retour aux guitariste, Christophe Lartilleux et son Ibanez Joe Pass (certains regrettent la Selmer), des cascades de notes piquées, presque en pizzicato, alternent avec des solos en octaves et des voicings tendus, Christophe est concentré.
Latcho Drom, c’est aussi cet espace interactif où tout peut arriver, une intro inattendue de Florin, un virage un peu sec, tout le monde est à l’écoute. Latcho Drom et Djangophonie, ce sont aussi des couleurs, des timbres : le «frotte frotte» rabouin et métronomique de Doudou Cuillerier, le drive très jazz de Joël Trolonge, le son américain de Lartilleux, les cordes… Les musiciens enchaînent avec «Rythme futur», ce thème du quintet première période, transfiguré par les arrangements du quatuor classique. Précision : François Théberge et Florin se sont chargés des arrangements.
Sur cet écrin, les solistes s’envolent (les interventions habitées de Florin sur «Artillerie lourde»). Le spectacle est maintenant bien avancé et Florin présente Zarifa, sa belle-fille, venue chanter «You don’t know what love is», c’est bien chanté, sobre et efficace et Zarifa est très jolie (Florin, décidément…).
C’est Christian Escoudé qui entre maintenant en scène sous les applaudissements, une belle Gibson 175 au poing. Un «Just one of those things», harmonisé «à la Escoudé», claque dans l’air, l’intéressé en profite pour lâcher un chorus très bluesy, superbe avec un gros son, Florin et Christian enchaînent un «Tears» qui flirte par moment avec les partitas de Bach. Les citations, sont d’ailleurs une constante chez ces musiciens, Escoudé avec un zeste de «Je m’suis fait tout petit» et la «Petite tonkinoise» ou Lartilleux avec le capricieux Nicolo Paganini. Escoudé, très concentré a cassé la baraque mais c’est maintenant un frisson qui parcourt la salle quand Birèli entre en scène et foudroie tout le monde avec un «Place de Brouckère» martien, on sourit tellement on est touchés et Latcho Drom aussi, tous revigorés. Birèli disparaît d’un coup et le groupe joue «Vera», une compo de Florin.
Puis, un «Joyeux anniversaire» est souhaité à Tchavolo par les musiciens, celui-ci souriant et ému attaque «I got rythm» au hachoir, le son magique de Tchavolo emplit la salle, c’est tranchant, costaud, «I got rythm», on veut bien te croire, Tchavolo. S’ensuit un «Manoir de mes rêves» avec les renversements d’accords made in Tchavolo, «Them their eyes» jubilatoire, Mr Schmitt, l’amateur de sangliers, défouraille, quelle santé, bon anniversaire Tchavolo…
Zarifa, la chanteuse revient sur scène pour un «Troublant boléro» inattendu, intéressant, (les textes sont de Serge Loizeau).
C’est maintenant au quartet de guitares, improvisé en coulisses, de prendre la scène. De gauche à droite : Bireli, Lartilleux, Escoudé et Tchavolo, les mousquetaires du jazz attaquent un «Blues for Ike», retenu… le temps du thème, après c’est l’explosion, le feu d’artifices… Tchavolo, passionné, tout sourire, est un spectacle à lui tout seul. Latcho Drom et le quatuor rejoignent maintenant les guitaristes (en tout 11 musiciens sur les planches), Florin présente un medley et ça repart avec «R 26». Cette deuxième partie est vraiment plus épicée, Biréli et la «Mélodie au crépuscule», on ne peut que sourire bêtement, puis c’est «Festival 48» et «Anouman», chantée en français par Doudou (moins réussi). On s’attendait bien sûr à l'universel «Minor swing», pas de problème, c’est bien dans leurs cordes, le public acclame sans retenue (au début du concert, on aurait entendu une mouche voler).
Mais il est tant de finir cette soirée et c’est tout naturellement que Florin joue l’intro de «Nuages» et laisse passer encore quelques facéties à ses compagnons.

On garde pour nous la "3ème mi-temps" privée qui s'est déroulée jusqu'à tard dans la nuit et où les guitaristes, infatigables, ont jammé pour le plaisir (certains musiciens étaient debout depuis 6 heures du matin, quelle santé...).